Chapelle de Notre Dame la Blanche
anciennement chapelle du Chef ou du Chevet, au Duc, de la Châtre
Cette chapelle, comme les quatre autres absidioles, date de la construction de la cathédrale début XIIIe siècle. Les meneaux des fenêtres ont été remplacés au XVIe siècle par des moulures formant des divisions flamboyantes. D'abord nommée chapelle du Chef car située à la tête de l'abside, elle devint Chapelle au Duc en 1367 quand le duc Jean de Berry y fonda une messe quotidienne qui eut lieu jusqu'en 1793. A la clé de voute sont fixées les armes de Mgr Célestin du Pont car il fit restaurer cette chapelle. Au XVIe siècle, cette chapelle fut acquise et restaurée par la famille de La Châtre. Les bustes de Gabriel et de Claude de La Châtre se trouvaient à droite et à gauche, là où sont les deux statues modernes de saint Joseph et de saint Jean. Ces bustes ont été brisés en 1793 et les épitaphes qui les surmontaient ont été transportées en 1822 dans la chapelle Sainte-Catherine.
La statue de la Sainte Vierge tenant l'Enfant-Jésus sur ses genoux est désignée sous le vocable de "Notre-Dame-la-Blanche". C'est une œuvre du début du XVe siècle provenant de la Sainte-Chapelle du Duc Jean de Berry. Détruites en 1793, les têtes ont été refaites en 1842 par Jules Dumoutet qui a aussi refait l'autel de pierre orné d'un bas-relief représentant la Dormition de la Sainte Vierge.
Les deux statues agenouillées à l'entrée de la chapelle sont celles du duc Jean de Berry et de sa seconde épouse Jeanne de Boulogne. Elles sont
l'œuvre du sculpteur Jean de Cambrai (Voir l'historique ci-après). Elles proviennent aussi de la Sainte-Chapelle du Duc Jean détruite en 1757.
Saint jean tient dans la main une coupe où émerge un petit dragon. En voici l'explication :
Saint Jean
triomphant de l’épreuve de la coupe empoisonnée : Le grand prêtre du temple d’Artémis à Éphèse, nommé Aristodème, dit à saint Jean l’Évangéliste pour l’éprouver :
« Si tu veux que je crois en ton Dieu, je te donnerai du poison à boire et s’il ne te fait aucun mal, c’est que ton Dieu sera le vrai Dieu. » Après avoir pilé des reptiles venimeux dans
un mortier, il essaie d’abord l’effet du poison sur deux condamnés qui succombent aussitôt. Alors l’Apôtre prend à son tour la coupe et, ayant fait le signe de la croix, il boit d’un trait le
poison sans en éprouver aucun mal. Puis il ressuscite les deux condamnés en étendant sur eux son manteau.
Deux passages des Évangiles (Matthieu XX, 20-24 et Marc XVI, 17-18) sont à l’origine de cette légende popularisée et amplifiée par la Légende
dorée.
Saint Jean est donc représenté avec la coupe qu' Aristodème lui a préparé et qui contient du venin de serpent symbolisé par un dragon.
Sources :
La Cathédrale de Bourges. A. de Girardot & Durand. La cathédrale de Bourges (1849)
La Cathédrale de Bourges. Amédée Boinet. La Cathédrale de Bourges (1952)
Cahiers d’Archéologie et d’Histoire du Berry. N°80 de mars 1985. Article de Jean Favière pages 47 et suivantes.
Notes sur les priants - Mme Véronique Schmitt
Les vitraux
La Commission diocésaine d'Art Sacré a édité une brochure de 4 pages (voir ci-dessus) donnant une description très
complète de ce vitrail. Brochure en vente à la boutique de la cathédrale (1€ pièce).
Dans leur ensemble, les vitraux de cette chapelle sont contemporains des restaurations faites au XVIe siècle par la famille de La Châtre. Ils sont
consacrés à la vie de la Sainte Vierge.
Très souvent remaniés (des fragments du XVe siècle y furent introduits), un carreau de verre bleu installé derrière la statue de la Vierge en 1844 et supprimé en 1927, verres manquants en bas des vitraux remplacés par des armoiries en 1954. Toutes ces armoiries ont été faites par Mrs.Francis et P. Chigot, Maîtres verriers à Limoges.
Vitrail de gauche
Il se lit de bas en haut. En bas à gauche, les armes de Mgr Fillon, archevêque de
Bourges de 1934 à 1943. A droite, les armes de la Maison de La Châtre (de gueule à la croix ancrée de vair). Au dessus, Joachim et Anne reçoivent chacun la visite d'un ange leur annonçant qu'ils
auront bientôt un enfant. Ensuite, rencontre de Joachim et Anne à la Porte Dorée (scène apocryphe). En haut, présentation de la Vierge au temple.
Vitrail de droite
Attention, ce vitrail se lit depuis le haut vers le bas. Nous avons donc en haut l'Annonciation, puis l'Adoration des Mages et la Fuite en Égypte. En bas du vitrail
à gauche, les armes de la Maison de Saint-Amadour (Marie de Saint-Amadour était l’épouse de Gabriel de la Châtre . Claude de la Châtre était leur troisième enfant) qui porte de gueule à trois
testes de loup arrachés d’argent, deux et un et à droite les armes de Mgr Lefèbvre, archevêque de Bourges de 1943 à 1969.
Ecartelé au 1 et 4 de gueule à deux demi-bandes d’or accompagné d’une croix ancrée d’or et d’un lis au naturel d’argent ; au 2 et 3 d’ azur au sautoir formé d’un glaive d’argent à la poignée d’or et à la houlette d’argent.
Fenêtre centrale
Se lit de bas en haut. Derrière la statue : L’écusson de gauche est « de la Chastre escartelé de Saint-Amadour qui porte de gueule à trois testes de loup
arrachés d’argent, deux et un, entouré des ordres du roy et couronné d’une couronne comtale » Les colliers des ordres sont ceux portés par Claude de la Châtre (Ordre de St Michel ( 1566) Ordre du
St Esprit (1585). C’est donc certainement l’écusson de Claude de la Châtre.
L’écusson de droite « mis en fusée où sont les armes de la maison du surnom de Chabot-Jarnac qui sont champées d’or à trois chabots de gueules péris en pal, deux et un, entouré d’une cordelière et couronné d’une couronne comtale. » (Chabot : petit poisson ayant une grosse tête et des nageoires épineuses vivant aussi bien dans la mer qu’en eau douce).
Au dessus, la Dormition de la Vierge puis l'Assomption. Dans le tympan, le monogramme de Claude de La Châtre : deux C entrelacés, barrés par un I qui sont les initiales du maréchal et de sa femme, Jeanne Chabot.
Les Priants du Duc Jean de Berry et de Jeanne de Boulogne
Les « Priants », en pierre de Charly, du Duc Jean de Berry et de sa seconde épouse Jeanne de Boulogne sont sans doute dus comme le tombeau du Duc Jean au ciseau de Jean de Rupy dit Jean de Cambrai dans les années 1400-1410 puisque le « haut col en trompette » de Jeanne de Boulogne était à la mode en France dans les costumes de cour durant cette période.
Ci-dessous, les dessins sur carton, craies noires et de couleur exécutés par Hans Holbein lors de son passage à Bourges en 1424. Ces cartons sont conservés au Kunstmuseum de Bâle (Cabinet des Estampes). L’identification des modèles du peintre remonte à 1873 ; elle a pour auteur l’historien bâlois Jacob Burckard. Jusque-là ces deux œuvres, entrées dans les collections de la ville de Bâle en 1662, grâce au legs du Cabinet Amerbach, étaient considérées comme des études faites sur le vif pour des portraits de donateurs inconnus.
Ces deux priants ne semblent pas avoir souffert des guerres de Religion. Les premières mutilations datent de 1793. Les têtes furent brisées et les armoiries
« buchées ». La tête de Jeanne de Boulogne a complètement disparu à cette époque et celle du Duc Jean, très mutilée, est conservée au Musée du Berry. Les mains et les avants-bras du duc
avaient aussi disparus.
Tout resta en l’état jusqu’en 1842. A cette date on confia à Jules Dumoutet la restauration de la chapelle axiale. Il refit donc entre autres les têtes de Notre-Dame la Blanche et celle de l’Enfant Jésus, détruites elles aussi par les révolutionnaires et les têtes de Jean de Berry en s’inspirant de celle, mutilée, restée en place et de Jeanne de Boulogne de manière complètement fantaisiste (voir photo ci-après). Jules Dumoutet était un sculpteur renommé à Bourges et aussi historien : pourtant, il fit peindre les armes de la première épouse du Duc Jean, Jeanne d’Armagnac sur le prie-Dieu au lieu de celles de Jeanne de Boulogne. Suite à la découverte des cartons d'Hans Holbein, on refit en 1911 la tête de la duchesse de façon plus conforme.
Bibliographie
Cahier de la Société d'Archéologie et d'Histoire du Berry N°80 (pages 47 à 54) - mars 1985
Bourges, source d'inspiration d'Holbein - A la mémoire du professeur Hans Reinhardt. par Jean Favière
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